Pour reprendre ce que je disais sur un autre forum :
Le projet LOPPSI met en place (plus précisément continue à mettre en place, après Hadopi) les dispositifs techniques, avec une liste de sites bloqués NON DIFFUSÉE.
D'une part, la liste des infractions visées pourra être étendue par décret (casinos en ligne, diffamation, plus tard diffusion d'idées contraire aux projets du gouvernement, les sites
anti-filtrage et anti-censure...).
D'autre part, la liste n'étant pas rendue publique, des sites peuvent être ajoutés volontairement, même s'il n'ont rien à voir avec les infractions visées, puisque la transparence n'est pas voulue.
De plus, la "sécurité" du juge d'instruction pourrait bien tomber :
http://www.numerama.com/magazine/12976-Loppsi-les-mouchards-sous-l-autorite-d-un-juge-en-voie-de-disparition.html
Et pour ceux qui n'avaient pas encore lu :
Decryptage : Sarkozy et son oeuvre de contrôle du net.
MAM dit dans l'exposé des motifs que ces sites sont en constante augmentation, et qu'il faut protéger les internautes de ce genre de contenus, internautes qui tombent dessus involontairement.
Déjà, "en constante augmentation" sans aucune étude, allez, croyons-la sur parole. Il faut "protéger les internautes de ce genre de contenus" : cette loi veut combattre l'immense danger que coure la population, qui risque de tomber sur un site pédopornographique sans faire exprès (elle ne vise en rien la lutte anti-pédophiles).
D'après les nombreux commentaires lus ici et là, combien sont déjà tombés sur 1 image pédopornographique en 15 ans d'internet? Le "danger couru" est-il si énorme?
http://www.numerama.com/magazine/13010-La-Loppsi-veut-proteger-les-internautes-avec-le-filtrage.html
Par ailleurs, quel pourcentage représentent les sites pédopornographiques accessibles en HTTP par rapport à tous les contenus sur des réseaux chiffrés? Je n'en ai aucune idée, mais ça ne me surprendrait pas que ça ne dépasse pas 5% (source aussi fiable que celles apportées dans le projet de loi) : ces personnes doivent savoir que ce qu'elles font est mal, et prennent sans doute des mesures pour se cacher.
Donc pour résumer, pour combattre un danger quasi-inexistant de tomber sur une image pédophile sans le vouloir en naviguant sur internet, qu'on peut déjà combattre par des procédures légales existantes (mais en un tout petit peu plus de temps), on va mettre en place tous les mesures pour pouvoir filtrer du net des sites sur simple demande du gouvernement (je rappelle que la liste des sites filtrés ne sera pas publique, et que dans d'autres pays où ce filtrage a été mis en place,
seulement 32% des sites étaient réellement des sites pédopornographiques).
Si vous croyez vraiment que l'objectif est de combattre ce "danger" hautement improbable de tomber par inadvertance sur une image pédophile, qui par ailleurs ne fera que finir de déplacer le problème sur les réseaux chiffrés (et donc empêcher toute remontée aux sources), je vous trouve bien naïf de ne pas oser imaginer que ce n'est pas le but réel de la loi (ou plutôt de cette nouvelle pièce de puzzle qu'est cette loi)...
Quand j'entendais "Sarko est un dictateur, il veut tuer la liberté d'expression et contrôler les médias, il est pour une France inégalitaire...", je me disais "mais n'importe quoi, vous délirez".
Puis il y a eu la réforme audiovisuelle (nomination du président notamment, sans compter suppression de la pub sur les chaînes publiques). Puis il y a eu Hadopi (que j'ai suivi de très près, dans les tribunes de l'assemblée parfois), où j'ai vu tous les mensonges assénés pour faire passer la loi coûte que coûte (quitte à dire quelque chose et son contraire à une journée d'intervalle). Où les médias n'ont quasiment jamais parlé des arguments contre la loi ; enfin, si, un peu avant le 9 avril, mais après, tous les médias étaient verrouillés, les journalistes subissaient des pressions et annulaient des contacts avec la quadrature du net. Où évidemment l'épisode du licenciement de TF1 a bien révélé les relations entre les médias et le gouvernement.
À propos de la France inégalitaire (rien à voir avec loppsi, mais bon, c'était un des arguments que je trouvais "exagéré"), Sarko l'a lui-même dit récemment : « Une société égalitaire c'est le contraire d'une société de liberté et de responsabilité » (propos cité par Bayrou dans son livre « Abus de pouvoir »).
Pour ceux qui ont suivi Hadopi, on retrouve exactement les mêmes éléments :
* procédure d'urgence
* chiffres annoncés sans étude citée dans l'exposé des motifs
* prétexte annoncé que personne ne peut contester (on ne peut pas contester qu'il faut que les artistes soient rémunérés, comme on ne peut pas contester qu'il faut lutter contre la pédophilie)
* l'application du texte ne résout en rien le problème (hadopi : les artistes ne vont pas être plus rémunérés, loppsi : les pédophiles ne seront aucunement gênés, ils seront même protégés car ils ne pourront aller que sur des réseaux chiffrés)
* des mesures qui permettent de surveiller (même des innocents) et de bloquer des contenus dérangeants (pas que illégaux)