c-cube a écritAstrolivier a écritSalut,
Moi je suis à fond pour cette technologie. elle va finir d'achever le système capitaliste en coupant sa base au bazooka : le travail.
Salut !
Je ne pense pas que la technologie de l'impression 3D sera suffisante à elle seule pour nous forcer à changer de paradigme économique. À mon avis, ce qui permettra bien davantage de faire monter la pression sociale à ce sujet, en mettant fin très rapidement à un grand nombre d'activités humaines actuellement rémunérées, c'est plutôt le champ de la robotique et de l'intelligence artificielle.
en fait on est déjà en train de changer de paradigme, ou plutôt le système capitaliste a déjà changé mais nos mythes et comportements pas encore, ce qui n'augure rien de bon. nous sommes toujours avec la "valeur travail" c'est à dire que ce qu'on s'échange in fine c'est de la quantité de travail en relation avec la productivité¹. sauf que de plus en plus on passe de la sphère de la production vers celle de la circulation. en simplifiant au départ on s'échange des marchandises industrielles ou manufacturières mais de plus en plus la part des services (assurances, banques, distributeurs, transports, relations publiques, etc...) devient prégnante, ce qui veut dire que le travail productif de richesses diminue tandis que le travail qui réparti ces richesses et essaie de maximiser leur production augmente de façon vertigineuse. les imprimantes 3d, dans leur objectif, vont annihiler le travail productif mais ne vont rien changer à à la sphère de la circulation, ce qui fait qu'on va se retrouver avec le paradoxe de devoir payer tout un tas choses alors même que la production ne coûtera quasiment plus rien. c'est psychologiquement problématique, et ça ne marche pas ni en théorie ni en pratique. on le voit déjà à l'aune de la crise de 2008 avec ce retour de l'idéologie de la production industrielle, et surtout avec la finance. alors que tout le monde voudrait faire rendre gorge à la finance, en y regardant de plus près, elle est ce qui permet cet écran de fumé pour ce déversoir d'argent sans lequel le système se serait déjà écroulé. on parle souvent des "quantitative easing" (en bon français : planche à billet) des usa, gb, japon, mais en regardant les chiffres de la très orthodoxe (on pourrait dire fanatique) bce, chantre de la rigueur budgétaire on s'aperçoit que l'augmentation de la masse monétaire est autrement plus grande que la croissance². nul besoin d'être "expert" pour comprendre ce que cela veut dire : tout le monde balance de l'argent à tout va pour maintenir le capital à flot, sans quoi ça ferait belle lurette qu'on serait en décroissance du pib. mais pour la production de valeur (au sens marxiste, c'est à dire en travail abstrait productif) c'est déjà le cas, et c'est ce qui fait qu'on paie toujours aussi cher certains biens malgré une augmentation massive de la productivité : il faut payer tout le travail non productif induit par la société, ce qu'on peut admettre pour la santé, mais plus difficilement pour l'industrie des dérivés (quoi que les libéraux y arrivent...). la robotique (aussi dit révolution électronique ou microélectronique) a déjà bien entamé le gâteau, les imprimantes 3d sont destinées à l'engloutir.
en ce qui concerne l’intelligence artificielle, au sens du courant des années 60 et après, qui se situe plus ou moins (chronologiquement) entre la cybernétique et les sciences cognitives, ça s'est surtout vérifiée comme un vaste échec. à moins que tu ne parles tout simplement d'informatique, que j'englobe dans la révolution électronique. le jour où un ordinateur sera capable d'avoir un langage, c'est à dire de penser de façon appropriée à une question sans que ce soit une réaction induite (répondant à un stimulus) par celle-ci, on en reparlera. pour l'instant n'importe quel enfant de 3 ans a des capacités totalement inconnue des programmes informatiques, et la recherche à ce sujet est dans une impasse totale (voir par exemple la conférence de noam chomsky au collège de france "language and beyond")
Astrolivier a écritle problème c'est que tel qu'on est parti et vu l'ampleur de la réflexion autour d'une alternative, plutôt que de profiter de l’opportunité pour faire advenir un monde basé sur des activités enrichissantes intellectuellement, presque dépourvu de labeurs, dans lequel on pourrait avoir successivement plusieurs vies et avec une orientation vers la frugalité (qui présuppose un cadre anthropologique qui réprime notre tendance à l’appropriation), on va tout droit vers un monde où quelques uns ont le pouvoir (à travers la détention de la production), une classe de travailleurs très limité pourra jouir de quelques privilèges qu'elle défendra férocement, et l'immense majorité sera considéré comme un reste inutile qui dépendra de la "charité" des possédants (de la technologie et des matières premières). remarquez qu'ont a déjà le pied à l'étrier pour ce deuxième choix (ou non choix plus exactement).
En fait, vu que l'impression 3D atomise complètement la possibilité de production de nombreux biens, j'ai plutôt l'impression que les détenteurs de pouvoir sont et seront toujours les détenteurs de richesses plutôt que des moyens de production. L'un des plus gros problèmes de cette planète, c'est bien l'injuste répartition des richesses et des ressources. Cela dit, je te rejoins assez dans ton constat.
les détenteurs de pouvoirs sous l'ère capitaliste sont les détenteurs de moyens de production. pour s'en convaincre il suffit de voir qui est dans le forbes 500 : les propriétaires des multinationales. l'argent n'est que l'illusion qui cache le réel pouvoir. c'est parce que les gates, buffet, arnaud, lagardère etc sont propriétaire des mcdo, wallmart, lvmh, exon, total etc... qu'ils ont du pouvoir et par conséquent de l'argent, et non le contraire. on peut éventuellement y voir quelques rentiers genre saoudiens etc... mais on voit de plus en plus qu'avec cet argent ils font des fonds souverains qui en plus de vouloir éduquer nos jeunes de banlieue rachètent un peu tout à tour de bras (que ce soit de l'immobilier, des multinationales ou le psg), avec une tendance de plus en plus forte dans les marchés des dérivés (marchés complexes qui en dernière analyse déterminent les prix), c'est à dire que les rentiers investissent dans la production et la circulation du capital.
en rapport avec ce qui est dit plus haut je crois, si ces imprimantes 3d adviennent ce qu'elles promettent (ou ce qu'on leur fait promettre) on va voir réellement qui a le pouvoir comme on en a déjà eu la démonstration avec le web ou la numérisation des supports. alors que quand je suis arrivé en 2006 sur ce forum on pouvait encore avoir quelques espoirs sur le pouvoir émancipateur des technologies, on est bien obligé de se rendre à l'évidence. alors que l'industrie des droits d'auteurs est un lobby minuscule, on s'est fait entuber sur toute la ligne et on devrait pas tarder à voir les annuités des da augmenter ad vitam eternam (à mesure que la fin de ceux-ci rapprochent les elvis ou walt disney d'un hypothétique domaine publique), et le web est maintenant cadenassé par les multinationales et leur police politique (nsa dgse mi6 etc...). il ne manquera pas d'advenir la même chose en pire pour les imprimantes 3d via le cheval de troie des brevets. voir les multinationales, toutes productions confondues, dire "ok, on va renoncer à notre rente et nos affaires, on va juste faire en sorte de fournir des matières premières³ gentiment et vous pourrez tout produire à côté de chez vous dans un fablab quasi gratuitement" est proprement irréaliste. pour autant il va y avoir une grande guerre entre eux (et donc potentiellement entre les non alignés, chine en premier, et les usa et leur caniche) pour savoir qui va avoir le contrôle de la technologie et des droits sur les spécifications techniques.
enfin bon tout ça c'est si on voit arriver autre chose que des briques en plastique, comme une vraie industrie métallurgique et une agregation des différents matériaux. en ceci je trouve les détails donnés sur les armes à feux intéressants.
1 : pour plus de détail, ces 3 conférences sont un bon début je pense :
http://www.criseetcritique.org/Jappe/Ottawa.2013.03.12.mp3
http://www.criseetcritique.org/Jappe/Montreal.2013.03.15.mp3
http://www.criseetcritique.org/Jappe/Montreal.2013.03.14.mp3
2 : comparer ce graphique à la croissance effective de l'économie et on peut voir que la masse monétaire augmente de 2 à 8% plus vite que la croissance du pib :
http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Euro_Money_Supply.jpg
3 : la question des matières premières (dont la suisse est numéro 1 mondial, pour une esquisse du problème) va se montrer de plus en plus, aussi bien pour les questions d'accaparement (très politiques et très corruptrices), que pour les questions environnementales : même si on écarte tous les problèmes ci-dessus et qu'on a tous accès libre à cette technologie avec des schémas techniques libres etc..., reste le problème anthropologique des désirs illimités. il sera extrêmement difficile de faire accepter à la société de limiter drastiquement ses désirs, faute de quoi c'est la survie même de la planète qui est menacée, quand on est pas dans le délire total comme avec les projets pour aller chercher des astéroïdes ou autres technonévroses.