C'est plutôt le journal que je lis en ce moment et je relève ces extraits (suivis des liens donnant les articles entiers) . Désolé, je n'ai POUR LE MOMENT essentiellement de sources que d'écrivains et philosophes écrivant pour Libé mais ce serait intéressant d'en relayer émanant d'autres journaux, avec peut-être d'autres sons de cloches ?
« Philippe Lançon (journaliste à Libération et à Charlie Hebdo, grièvement blessé mercredi) parlait toujours des conférences de rédaction de Charlie comme de l’espace de parole le plus libre qui soit, celui où s’échangeaient les propos les plus drôles, les plus brillants, les plus subversifs, les plus détonants, au vrai sens du terme : Charlie n’était pas dans le ton, mièvre et convenu, parfois angéliste, des discours ambiants. Charlie faisait tache, comme le gros rouge, comme la merde - Charb n’a-t-il pas été mis en examen pour un étron fumant représentant Marine Le Pen, «la candidate qui vous ressemble» ? Oui, d’une certaine façon, nous avons laissé les journalistes de Charlie se coltiner seuls toute cette merde, le fondamentalisme, l’obscurantisme, le racisme - faisant parfois la fine bouche devant leurs outrances, ou leur reprochant de souffler sur la braise trop ardente des communautarismes et des clivages sociaux, voire d’alimenter l’islamophobie. Islamophobie, tu parles ! En France, l’islamophobie est le nom dont s’affuble le racisme, la bonne vieille haine anti-Arabes et anti-Noirs. La religion, dans cette histoire, n’est que l’alibi fumeux dont se pare la haine, des deux côtés. Du côté des fanatiques pseudo religieux comme du côté de ceux qui appellent au «choc des civilisations».
« Ils ont visé la tête » Emmanuelle Bayamack-Tam/ Ecrivaine/ Article entier =
http://www.liberation.fr/societe/2015/01/09/ils-ont-vise-la-tete_1177310
« Ils sont entrés et ils tirent. Je les imagine en train de tirer. Parce qu’un écrivain, il fait ça, il imagine le réel quand il ne peut pas le voir ou quand ce réel dépasse son entendement. Depuis mercredi, je ne peux pas m’empêcher de penser à ce moment, celui où ils tirent, où ils ouvrent le feu. On me dit qu’ils n’ont pas eu d’hésitation, qu’ils étaient déterminés, qu’ils avaient tout prémédité, et moi, je pense qu’en effet, ils n’ont pas hésité, ne serait-ce qu’une fraction de seconde, parce qu’hésiter, cela aurait signifié qu’ils étaient encore du côté de l’humanité, qu’ils n’avaient pas tout à fait basculé dans le monstre, or il faut être du côté du monstre, pour faire cela, du côté de la non-humanité. »
« J'imagine parce que j'en ai besoin ». Philippe Besson Ecrivain / Article entier =
http://www.liberation.fr/societe/2015/01/09/j-imagine-parce-que-j-en-ai-besoin_1177303
« Devant l’assassinat des journalistes de Charlie Hebdo, la prise de conscience de la liberté dont nous jouissons dans notre société, qu’expriment les manifestations spontanées des citoyens et la mobilisation de la presse, est spectaculaire. D’autant plus spectaculaire que nous avons tendance, d’ordinaire, à somnoler sur le coussin douillet que cette liberté nous procure. La mort des journalistes aura au moins servi, dit-on, à ce réveil de la conscience.
A nous maintenant de ne rien entamer, ne rien négocier de cette liberté. Dans les grands principes, les grandes causes politiques, c’est évident. Face à la tentation des petites lâchetés du train-train quotidien, c’est plus difficile. On peut descendre dans la rue, signer des pétitions, des manifestes, mais qu’en est-il de notre conduite individuelle ? Sait-on toujours bien résister à ces phénomènes pervers qui rongent notre liberté intérieure et qu’une personne de ma génération (20 ans en 68) voit avec désolation se développer de plus en plus ? Nous vivons dans une société où il y a bien moins de censure d’Etat qu’autrefois, infiniment moins que dans d’autres sociétés dans le monde, mais où l’autocensure en revanche, sous la pression d’un politico-sexo-écologiquement correct, gagne des circonvolutions de nos cerveaux. »
« Ne rien négocier ». Catherine Millet Ecrivaine/ Article entier =
http://www.liberation.fr/societe/2015/01/09/ne-rien-negocier_1177312
« Un homme à la radio ce matin parlait de ça : du rire. Du fait que le rire ça grattait, ça agaçait, c’était terrible. Que ça se laissait pas attraper, qu’on pouvait pas y répondre, jamais savoir si c’était de la bidouille ou du bidon, et que pour ça c’était insupportable, ça les rendait fous les sérieux, les fachos, les fanatiques de l’ordre, les paniqués du brouillard, les allergiques au pas clair. Le rire ça flotte, disait l’homme à la radio, et il y en a qui supportent pas que ça flotte. »
« Ce que tu lui as mis, Bud ». Sylvain Prudhomme/ Ecrivain/ Article entier =
http://www.liberation.fr/societe/2015/01/09/ce-que-tu-lui-as-mis-bud_1177313
« Les dessinateurs de Charlie Hebdo ont-ils été imprudents ? Oui, mais le mot a deux sens, plus ou moins aisément démêlables (et, bien sûr, il entre ici une part de subjectivité). Mépris du danger, goût du risque, héroïsme si l’on veut. Mais aussi indifférence envers les conséquences éventuellement désastreuses d’une saine provocation : en l’occurrence le sentiment d’humiliation de millions d’hommes déjà stigmatisés, qui les livre aux manipulations de fanatiques organisés. Je crois que Charb et ses camarades ont été imprudents dans les deux sens du terme. Aujourd’hui que cette imprudence leur a coûté la vie, révélant du même coup le danger mortel que court la liberté d’expression, je ne veux penser qu’au premier aspect. Mais pour demain et après-demain (car cette affaire ne sera pas d’un jour), je voudrais bien qu’on réfléchisse à la manière la plus intelligente de gérer le second et sa contradiction avec le premier. Ce ne sera pas nécessairement de la lâcheté. »
« Trois mots pour les morts et pour les vivants » Etienne Balibar/ Philosophe/ Article entier =
http://www.liberation.fr/debats/2015/01/09/trois-mots-pour-les-morts-et-pour-les-vivants_1177315
« Au lendemain de la tragédie, nous nous réveillons et voyons la réconciliation de notre peuple autour de ce qui lui est cher. Ce ne sont pas les réactions politiques, ni les unions nationales de façade, toujours fissurées au gré des ambitions, qui m’ont impressionné, mais la triste et tranquille assurance avec laquelle les Français ont fait face ensemble, dans le rassemblement spontané, sans haine, sans esprit de vengeance, sans peur.
(…)
L’islam n’est pas un problème, mais l’islam a un problème, la violence fondamentaliste, et nous serons aux côtés des pays musulmans pour qu’ils le surmontent et trouvent leur chemin de modernité et de paix. »
« L'insurrection des crayons »/ Dominique de Villepin Ancien Premier ministre/ Article entier =
http://www.liberation.fr/societe/2015/01/09/l-insurrection-des-crayons_1177304