Floriane a écritTrouvé dans la signature de quelqu'un :
« Ne pas se soucier de la protection de la vie privée sous prétexte que l’on a rien à cacher, c’est comme ne pas se soucier de la liberté d’expression sous prétexte que l’on a rien à dire »
La liberté d’expression consiste aussi au plaisir, à la pulsion de beaucoup révéler de nous-mêmes, dans les réseaux sociaux, par exemple. On peut donc contribuer grandement à ne pas se soucier de la protection de nos vies privées par le seul exercice de la liberté d’expression. Je veux aussi dire par là que si le domaine privé envahit de plus en plus l’espace public, c’est qu’on y est bien pour quelque chose.
Floriane a écritRaisonnement qui sonne bien au premier abord mais qui me semble tout à fait fallacieux si on réfléchit bien.
Après réflexion, il ne me semble pas fallacieux, il l'est complètement :
N'avoir rien à cacher ne regarde que soi, et on peut très bien vivre dans une société où personne ne cacherait rien aux autres, à son bon vouloir. À l'inverse la liberté d'expression dont l'existence même est nécessaire, ne peut en aucun cas être souillées d'aucune manière, car sa jouissance absolue est seule garante de son intégrité.
Que l'on se garde notre intimité ou non, ça n'a pas de conséquence dans l'absolu, sur l'ascension du monde, sur les droits de chacun et de tous. Alors qu'une anodine lésion de la liberté d'expression la mettrait en branle, et lui laisserait aucune chance de se sortir d'une infection qui pourrait se transformer en tumeur et gangrener toute idée.
Si je te comprends bien, tu dis que le fait de tout révéler de soi ne serait pas dommageable pour la société. Mais que si on touchait à la liberté d’expression, alors là ce serait grave. Mais moi je n’oppose pas ces deux choses dans la mesure où, justement, dans nos sociétés, la liberté d’expression est tout à fait encouragée pour nous pousser à tout révéler de nous-mêmes.
Mais imaginons une société dictatoriale et totalitaire où nous n’aurions aucune liberté d’expression. Et où nous serions fichés et où nous aurions du mal à cacher l’essentiel de nos vies privées.
Et bien je crois qu’il y aurait quelque chose que ce régime n’arriverait pas à percer. Mais que même un régime démocratique n’arriverait pas à percer.
Parce que dans ton raisonnement tu passes de
la vie privée (premier post) à
l’intimité (deuxième post).
M’est avis qu’il y a une distinction à établir : vis-à-vis de ce qui les menace, (comme le Big Data « démocratique » ou un régime dictatorial sans liberté d’expression) la vie privée ce n’est pas tout à fait l’intimité.
L’intime c’est ce qui est contenu au plus profond d’un être et c’est très difficilement mesurable, quantifiable et « exploitable ». Surtout quand il s’agit d’une relation entre deux êtres.
Google pourra tout connaître de ta vie privée, de tes goûts et tes couleurs, de tes aversions, de tes préférences sexuelles et tout ce que tu voudras mais il n’arrivera pas à vraiment cerner ce qui a pu se jouer à un moment « T » (ou à des moments « T ») dans une relation intime que tu auras eue avec quelqu’un (sauf si tu essaies de le révéler toi-même de manière profonde d’une manière ou d’une autre mais même encore : je ne crois pas que tu pourrais en révéler toute la complexité parce que tu aurais du mal à échapper au domaine mental qui te permettra de la retranscrire)
Pour mieux comprendre la chose, tu prends comme exemple le fameux sketch d’Yves Montand qui écrit un télégramme enflammé à la femme qu’il aime. L’opératrice retranscrit machinalement les mots tendres que lui dicte Yves Montand, sans la moindre émotion ni la moindre empathie. Comme l’opératrice les retranscrit mécaniquement, ça crée un effet très drôle, très comique.
https://www.dailymotion.com/video/xbfr8f
Et ce sketch montre que l’on ne rapporte pas l’intime sur un mode inquisiteur ni « informatif » comme tu le ferais en déclinant ton identité, ta date de naissance, ton groupe sanguin etc.. La parole intime n’informe pas en fait, elle n’apprend rien à l’autre, mais elle se partage, elle définit quelque chose qui relève de l’indicible, de l’émotion subjective, elle entretien un entre-deux secret..
Tout cela pour te dire qu’en fonction de ce qui nous menace (comme le "je sais-tout de toi" du Big Data et du Big Brother), je ne crois pas que la prolifération exponentielle des donnés massives, liées à l’efficacité et à l’objectivité des profilages automatiques ne parviendra jamais
à cerner complètement une personne ( au niveau privé, oui et pas qu'avec son consentement bien entendu) mais au niveau de son intimité la plus profonde, là ce sera beaucoup plus difficile pour ne pas dire impossible.
Et tant mieux.